Edito de juin

Chaque pays a ses peines et ses plaies. Les nôtres sont souvent dictées par le soleil et les pluies plus que les cours de la bourse, du moins le croyons nous naïvement. La moisson s’installe et la pluie bat les rizières. Les villageois sont partis vivre ensemble au plus près de leurs champs dans des cabanes de fortune. J’ai la mienne aussi. Ses cloisons de bambou et son toit de feuilles protègent sans isoler. Alors on cause avec le vent. Il brosse la terre, pousse les crachins et chasse le mal de vivre. Ma maison vibre, deviendra-t-elle éolienne ? Qu’à Dieu ne plaise !

Le ciel s’anime, devient mystérieux et étonnant, proche. Au loin, les mots d’une radio rassurent. Ceux de la cabane là-bas, dont le foyer est resté allumé, écoutent le vent aussi. Nous grandissons ensemble dans une communion si particulière et interdite aux bruyants.

Silence Il passe !

Retour sur le mois de mai

Un de nos anciens de Maewé vient de nous quitter. Tous s’extasient sur son âge : 87 ans. Chacun y va de sa contribution biblique pour honorer l’ancêtre : Abraham !

« Mais tu rigoles, Moise était bien plus âgé !

– Et quoi tu y étais peut être ?… ».

Avec lui, un monde disparaît, celui où on comptait à partir d’un événement qui avait tellement marqué la mémoire karenne : le vol des avions japonais durant la seconde guerre mondiale. Les villages avaient été terrorisés si bien que ce vol ferrailleux servait de pivot chronologique. C’était avant ou après le passage des avions. Ceux qui l’ont vécu et racontés s’en vont.

Le covid lui reste absent de nos villages sans pour autant cesser de nous narguer. La vaccination commence mais les résistances désarment les infirmiers qui tournent dans les villages pour chercher des bras a piquer. L’administration contraint ses fonctionnaires qui font la file au dispensaire en pensant au codicille oublié sur leur testament. Les rumeurs assurent de tant de maux suite à l’injection qu’ils se prennent en photo en sortant, exhibant le pansement témoin et le sourire retrouvé.

Bangkok et quelques lieux connaissent des foyers de contagions. Alors les villages leur sont fermés.

La rentrée des classes a été reportée d’un mois. Les élèves sont ravis. Sauf les écoliers de nos villages qu’on a convoqués à la date habituelle. Tous du même village, les professeurs aussi du même village… aucun risque donc à ouvrir dans les temps. Inutile de dire que les grands élèves arrachés a la liberté des escapades m’envisagent sans sourire.

Pâques aussi est terminée ! Et les 5 camps catéchisme également. Habituellement un seul camp rassemblait tous les enfants de la zone préparant la communion et la confirmation. Mais les mesures sanitaires nous ont obligé à multiplier les camps. La logistique devenait complexe mais le bénéfice fut grand car pour animer chacun de ces rendez vous, les jeunes se sont mobilisés et ont pris les choses en main : enseignements, jeux, veillées et liturgies n’ont pas épuisé leurs talents et notre admiration. Ils furent plus de 100 sur les 5 sites.

Les nouvelles de Birmanie enfin ne sont guère rassurantes. L’armée thaïe empêche désormais les contacts avec les réfugiés installés sur le bord du fleuve frontière.

Des villages entiers ont quitté leurs maisons et campent eux sur la rive opposée sans franchir la rivière. Ils ont tout perdu. Nous parvenons à les aider grâce à une ONG protestante efficace. Un petit pensionnat établi côté birman en face de Maetowo accueillait chaque année à peine 2 dizaines d’élèves. Les enfants fuient leurs villages et chaque jour ils arrivent dans ce petit pensionnat où ils sont aujourd’hui 130. Des panneaux solaires vont être installés et nous pourvoyons une aide alimentaire.

Les besoins sont immenses mais il est difficile de faire parvenir les secours. C’est terrible de savoir sans pouvoir réagir. Les contacts en ville parlent de restrictions terribles. Les banques sont fermées et les distributeurs servent 12 retraits par jour !

Le camp militaire de l’armée karenne à 25 km au nord de Maetowo côté birman accueille des jeunes de plus en plus nombreux venus se former au feu. On les dit très jeunes. Ils viennent d’une quantité de villages pour se préparer au pire. Combien ? Les rumeurs divergent.

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