Édito d’août

 

Mais pourquoi donc les missionnaires partent- ils chercher l’amitié si loin de chez eux ?

Peut-être la réponse est à scruter dans ce mystère que nous fêtons début août : la transfiguration.

Le visage de Jesus transfiguré, entrevu sur le mont Thabor, se révèle à nous désormais dans celui du frère. Lumineux et vulnérables, nous dévoilons chacun un pan de Son Visage à la manière d’une mosaïque incomplète. Il manque des pixels alors qu’on cherche à la reconstituer fébrilement. Et les lointains nourris d’autres cultures en révèlent des traits inconnus que le missionnaire découvre comme un inventeur privilégié. Une manière d’alpiniste découvrant la face cachée d’un sommet.

Belle fête de la transfiguration.

La chronique

 

Les rizières occupent les bras et n’entendent pas les libérer facilement. Après avoir semer, il faut éclaircir puis chasser tout le chiendent qui envahit les rizières avec pour seul mot d’ordre de vouloir étouffer la croissance du bon grain. Voilà une lutte usante et quotidienne qui se nourrit de l’espérance d’une moisson abondante. A l’aube, chacun part arpenter son champ armé de sa binette pour ce combat de rigueur. Certes, les pluies battantes et les coteaux ardus rebutent mais que faire contre la nécessité ? C’est cela ou la perspective d’un grenier vide !

Grâce à Dieu, les pluies restent abondantes malgré les prédictions alarmantes des météorologues. Les plus écoutés dans le pays sont… des buffles. Le mois dernier, la cérémonie du premier sillon, traditionnellement opérée par le roi, orchestre les augures. Des buffles de belle force et de haut lignage après avoir creusé ce premier sillon se voit proposer diverses nourritures. Leurs choix vaut pronostique sur le climat à venir. Les buffles n’ont pas bu. Alors il va faire sec ! Mais jusqu’à aujourd’hui l’imperméable reste de rigueur…

La vie politique nationale agite les esprits, mêmes nos Karens suivent avec frénésie les soubresauts des débats à la haute assemblée pourtant aussi longs qu’un sermon de carême. Cette haute assemblée constituée des deux chambres doit choisir ce mois-ci le prochain premier ministre. La manœuvre est complexe et obéit à des logiques qu’il faut débusquer. Les citoyens ont voté en mai.  Il en est sorti un vainqueur. On l’imagine premier ministre désigné ? Eh bien non ! Les députés fraîchement élus ont ratifié le choix des urnes mais les sénateurs le contestent. Il faut trouver un autre candidat plus unanime, apprécié des députés et des sénateurs. La haute assemblée discute et la rue gronde. Le pays est sous tension et chacun garde en mémoire les grandes manifestations de rues d’avant covid.

Les Karens suivent les débats via les réseaux et guettent les annonces officielles. Le 13 juillet dernier il y a messe à Oupouta. Le maire catholique est revenu de son champs. Le Pado guilleret le félicite de sa piété car le maire n’est pas un pilier d’église réputé ! Bravo, accolades pour saluer la dévotion du maire devant sa femme hilare qui n’hésite pas à le trahir : « Pado ! Il est venu pour l’annonce du premier ministre pas pour la messe ». Le maire bougonne bien un peu mais bien vite interpelle le Pado : “ Ce soir pas trop longue l’homélie ! “.

Notre rizière paroissiale elle aussi appelle ses bras. Vaste et plate, bien irriguée, c’est une belle rizière qui nourrira les élèves des centres et permettra une fameuse économie. Elle est entretenue par les catéchistes et des paroissiens bénévoles. Pour planter le riz, chacun est invité. C’est un très gros travail et par solidarité chaque village enverra des bras. Les parents d’élèves, les anciens, les cancres repentis ne loupent pas ce jour. Des dizaines de motos affluent et à 8 h on a tous les pieds dans l’eau et on repique. Les sœurs et les éclopés cuisinent pour les 150 bouches à nourrir ! Les verres d’alcool de riz s’échangent discrètement : on craint rien car on sait que le Pado est aveugle ce jour-là…

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